Comme je l'explique dans le dossier N°9 "l'eau et le cinéma", l'eau liquide est absente au cinéma - à part sous forme de décor - alors que l'argent généré par la distribution de l'eau liquide a permis au cinéma français de se financer. Oui mais...Filmer l’eau liquide n'est pas simple, car c’est comme vouloir filmer un animal ou un enfant, vous devez allez vers elle. Ce qui revient à se plier, s’agenouiller, se salir et parfois à passer outre les consignes qui invitent à la prudence ou qui interdisent d’aller vers elle par mesure de sécurité. Dans cette démarche, nous faisons face à notre conflit existentiel entre le sauvage (corps) et le civilisé (caméra). Pour filmer l’eau nous avons besoin des deux, il est donc nécessaire de dépasser cet apparent antagonisme en acceptant ces deux aspects qui nous composent. Par conséquent, la reliance avec le divin n’est pas possible avec le cinéma actuel car l’intuitif (animalité) nécessaire à la créativité instinctive est réduite à son plus stricte minimum car produire un film professionnel est le travail d’une équipe. De fait, l'action de filmer revient à solliciter bien plus la psyché (divisible) que l’âme (indivisible), laissant peu de place alors à l’inconnu qui est essentiel à la captation intuitive dans une réalisation cinématographique. Ce constat est renforcée par la part prépondérante de l’argent et donc du pouvoir des différentes influences qu’exercent chaque membre d’une équipe de cinéma.
une équipe de cinéma |
L’artiste vidéaste, peintre ou photographe est libéré bien sûr de ces contraintes puisqu’il travaille seule et avec moins d'argent, ce qui est primordiale quand il s’agit d’explorer une vision intuitive d’un élément comme l’eau liquide qui n’existe pas à l’état artificiel. L’individu est ainsi plus enclin à honorer comme il se doit ce qui lui permet de vivre telle l’eau liquide. De fait, c’est tout un déconditionnement qui doit être mis en oeuvre pour accepter de baisser la tête pour filmer l’eau de près, comme si nous voulions la boire comme un animal le ferait très simplement, alors que dans nos lieux de vie, nous nous sommes organiser pour rester toujours debout pour la boire d’un robinet ou à la bouteille.
vidéaste en action |
Filmer l’eau liquide c’est donc réanimer son animalité permettant ainsi de réinvestir son corps afin d’être authentique et donc sans conflit. L’animal ne fait pas la guerre ou ne tue pas au sein de son espèce car il n’a pas d’égo, et partant de là, n’a donc pas conscience de lui-même, l'ultra-violence qu’on lui attribue à tort est le fruit de…Notre imagination. « Animer » et « Animal » sont deux mots qui viennent du latin animare (« donner de la vie »), et de anima (« souffle, vie »). Cette étymologie est identique pour le mot « âme ». De plus, filmer l’eau est rare car cela demande à celui qui entreprend cette démarche un véritable cheminement spirituel. Faites l’expérience de filmer l’eau et vous comprendrez ! Le rêve n’a donc pas ici sa place. Filmer c’est déshabiller l’objet de notre attention pour « voir » l’objet filmé nu. Si vous retournez le mot « nu », vous voyez le mot « UN », celui de l’unité et donc de l’amour.
Filmer l'eau liquide c'est se comporter comme avec une femme, il faut être patient et savoir l'écouter pour accéder à l'intime, et l'intime de l'eau, c'est l'amour. Par conséquent, filmer l’eau c’est filmer avec son âme et non avec ses désirs et donc sa psyché comme avec l’eau morphogénique (dossier N°2) omniprésente dans le cinéma. Pour percevoir l’eau liquide en tant que spectateur, la démarche est la même, cela demande d’être actif comme devant une photo ou une peinture car ceci nécessite d'aller vers elle, et implique donc d'être sans attente et de ne pas succomber à la paresse de l’éveil. Regarder un film comme « The Experience: Being Water », requiert d’être observateur et non voyeur. Cette attitude est difficile puisque le cinéma (et la télévision) nous mène à un voyeurisme sans cesse exacerbé, qui a pour conséquence que l’on s'appauvrit spirituellement tous les jours un peu plus et que la dose de divertissement doit aller crescendo au fur et à mesure que l’on s’enferme sur soi-même. Alors même que nous restons humains à vouloir s’ouvrir à l’autre.